Aider les projets régionaux à essaimer dans toute la France, c’est la mission que s’est donnée la Fondation Macif. Petites Cantines, Villages Vivants…, plusieurs associations de la région en ont déjà bénéficié. Des initiatives venues d’autres régions ont aussi pu s’implanter en Auvergne-Rhône-Alpes. Entretien avec Marcela Scaron, secrétaire générale de la Fondation Macif. Par Lionel Favrot
Quelle est l’histoire de la Fondation MACIF ?
Marcela Scaron : C’est en 1990 que la loi a permis aux entreprises de créer une fondation. Très vite, les représentants des sociétaires de la MACIF lui ont demandé de lancer une structure pour lui permettre d’intervenir en faveurde l’intérêt général de manière coordonnée. Jusqu’en 2009, la Fondation MACIF soutenait l’ESS de manière générale. Par la suite, on a concentré notre action sur l’innovation sociale en particulier l’accès de tous aux services essentiels.
A quoi correspondent ces “services essentiels” ?
Nos manières de nous déplacer, d’habiter et de consommer, en particulier en matière d’alimentation dans une perspective de prévention-santé, et cela de manière plus durable et solidaire. Sans oublier la finance.
Comment sélectionnez-vous les projets accompagnés ?
On soutient d’une part des projets nationaux mais aussi multi-régionaux et d’autre part des initiatives locales qu’on sélectionne grâce à notre ancrage régional. On a une équipe de dix personnes en région. L’objectif est d’aider ces porteurs de projets à l’éprouver pour ensuite pouvoir le dupliquer. Exemple avec Unis-Cité qui a développé le service civique en France, les Jardins de Cocagne qui ont été les premiers à lancé les paniers bio et solidaires, les Compagnons Bâtisseurs qui accompagnent l’auto-réhabilitation…
Vous n’intervenez que pour du financement ?
Non, on va au-delà. On est aux cotés des expérimentateurs. On apporte un accompagnement adapté à leurs besoins. On les mets en relation avec d’autres porteurs de projet qui pourraient partager leurs expériences mais aussi avec d’autres financeurs. On crée du lien ! Notre conviction est que l’innovation vient vraiment des territoires et qu’ils seraient dommage de laisser ces solutions pertinentes se limiter à une seule région. On accompagne les volontaires dans leur essaimage avec notre programme P’INS qu’on a monté avec l’AVISE et qui accompagne huit structures par an depuis dix ans.
Des exemples de programmes accompagnés à travers ce programme P’INS ?
Sylver Geek favorise l’accès au numérique des seniors, notamment des résidents d’EHPAD afin de rester plus facilement en contact avec leurs familles. Au lieu des ateliers habituels, il s’agit de jeux comme le WEbowling pour lequel sont même organisés des compétitions. La finale se déroule à la Paris Game Week et la Gamers Assembly, les deux principaux évènements de e-sport en France. Le public étant très jeune, cela facilite les liens intergénérationnels.
Au départ Sylver Geek était un projet régional ?
Oui, il est né de discussions dans l’ex-région Poitou-Charente entre la Banque Postale, Orange et la Macif. On l’a aidé à se développer notamment en Auvergne-Rhône-Alpes où il a été pris en main par Unis-Cité puisque ce sont souvent des services civiques qui aident les seniors à se former à ces jeux. On aide aussi beaucoup les Compagnons bâtisseurs, notamment dans l’Isère, pour accompagner les personnes en situation de précarité.
Combien soutenez-vous de projets par an ?
150 projets pour un budget de 3,4 millions d’euros répartis à parité entre les projets nationaux et les projets régionaux. On accompagne aussi des associations qui ont déjà essaimé comme Habitat et Humanisme, une initiative lyonnaise bien connue.
D’autres exemples de structures d’Auvergne-Rhône-Alpes qui ont essaimés grâce à votre fondation ?
Les Petites cantines qui sont passées par notre programme P’INS et qui sont désormais présentes dans la France entière. Exemple : dans le Pays de la Loire et le Grand Est. Mais aussi Villages Vivants qui s’engage contre la désertification des centres-bourgs en favorisant la réimplantation de commerces de proximité issus de l’ESS et en accompagnant d’autres initiatives de revitalisation. Ils sont désormais présents hors d’Auvergne-Rhône-Alpes, exemple dans la Lozère où ils ont aidé à s’agrandir Le Petassou, une ressourcerie de Moissac, dans le Parc National des Cévennes.
Qu’avez-vous aidé récemment ?
On a décidé de concentrer désormais notre action chaque année autour d’un thème, en l’occurrence l’habitat. Du coup parmi les 7 projets récemment aidés, on retrouve de nouveau les Compagnons Bâtisseurs Rhône-Alpes pour un chantier à Echirolles, mais aussi les Foyers Matter dans la Drôme qui aident les jeunes en grande fragilité sociale à se loger, Clubhouse Lyon pour l’aménagement d’un nouveau site permettant d’accueillir des personnes vivant avec des troubles psychiques et de leur proposer des activités, Gaïa, une association de Dardilly près de Lyon, pour un lieu de rencontre inclusif à destination des populations en grande précarité et en situation de handicap autour d’une activité maraîchère à ses bénéficiaires ou encore le Petit Peuple du bocage pour un tiers-lieu associant habitat léger et permaculture.
On a aussi lancé avec l’USH, le principal groupement de bailleurs sociaux publics en France, et France Tiers-Lieux, un appel à projet autour du bien vivre dans le quartier. Le pré-requis, c’est de faire participer les habitants du quartier à la gouvernance du lieu.
Quelles perspectives pour l’avenir ?
Les fondations doivent renouveler leur agrément tous les cinq ans. On l’a déjà obtenu pour les années 2024-2028 avec toujours cette priorité d’accès aux services essentiels dans tous les territoires mais aussi l’accompagnement de la transition écologique en partant des besoins les plus fragiles. Il faut les embarquer dans ce mouvement car ce sont en général ceux qui à la fois polluent le moins mais qui subissent le plus les effets du réchauffement climatique.
(Entretien publié dans le hors-série N°7 – 2023 de Mag2Lyon disponible par ce lien
https://www.mag2lyon.fr/produit/hors-serie-ess-2023/)
———————-Opération Spéciale 50 ans
“Pour marquer les 30 ans de la Fondation Macif, nous allons lancer La Belle Rencontre, une opération de budget participatif du 15 novembre au 15 décembre. Les sociétaires, salariés et élus de la Macif sont invités à voter pour le projet qu’ils souhaitent soutenir parmi 30 projets partenaires de la Fondation. Un total de 100 000 € sera alloué aux porteurs de projet avec des aides de 1 000€ à 10 000€ en fonction des votes. A l’issue du vote, les participants seront conviés à des évènements chez nos partenaires sur tout le territoire, par exemple des portes ouvertes ou des ateliers.”
Photo Marcella Scaron : ©Macif-Alexis Harnichard