Cinq candidats se sont désistés dans le Rhône dans les 13 circonscriptions sur 14 encore en jeu, pour permettre à un candidat mieux placé de battre le RN au second tour. Il s’agit de deux candidats de la majorité présidentielle, Sarah Tanzilli (Ensemble), dans la 13ème circonscription dès dimanche soir et Dominique Despras (Modem) qui s’est retiré in extremis, juste après avoir déposé sa candidature, évitant une quadrangulaire dans la 8e. Et de deux candidats socialistes, Jean-Henri Soumireu-Lartige dans la 9e et Florence Perrin dans la 10e, ainsi qu’un candidat communiste, Abdel Yousfi, dans la 11e circonscription.
Dans ces 13 circonscriptions, il se déroulera donc six triangulaires au second tour (1er, 4e, 5e, 7e, 8e et 12e ) et sept duels (2e, 6e, 9e, 10e, 11e, 13e, 14e) sachant que l’écologiste Marie-Charlotte Garin a été élue dès le 1er tour dans la 3e circonscription à Lyon.
Comment ces désistements vont-ils rebattre les cartes électorales ?
Le RN, bien que loin des 50%, était en tête dans quatre circonscriptions (8e, 9e, 11e et 13e) au 1er tour. Il devait donc profiter d’une triangulaire, voire d’une quadrangulaire dans la 8e, pour l’emporter dans ces circonstances.
Avec ces retraits, non seulement les électeurs non-RN restent majoritaires comme au 1er tour mais l’un de leurs candidats se retrouve désormais en position de les rassembler pour gagner au second tour.
D’un point arithmétique, ce barrage républicain devrait atteindre son objectif. Ce qui n’exclut pas une victoire RN si ces reports de voix ne fonctionnent pas, ou trop partiellement. La clé étant non seulement le comportement des électeurs dont le candidat s’est désisté mais aussi la réaction de ceux dont le candidat a été éliminé dès le 1er tour. LR est ainsi absent du second tour dans 12 des 14 circonscriptions du Rhône.
Le député sortant macroniste de la 10e circonscription Thomas Gassilloud, légèrement en tête devant le RN au 1er tour, devrait bénéficier d’une partie des 23,64% de la candidate socialiste au 1er tour. Sans oublier les 9% de votants pour le candidat LR, non qualifié pour le second tour, qui pourraient également accepter de rallier l’ancien maire divers droite de Saint-Symphorien-sur-Coise.
Pour être réélu dans la 11e circonscription, le député sortant macroniste Jean-Luc Fugit doit compter sur une discipline de vote exemplaire des électeurs du candidat communiste Abdel Yousfi qui s’est retiré en appelant à faire barrage à l’extrême-droite. Ce qui n’est pas exclu car Jean-Luc Fugit, très impliqué sur les questions environnementales, vient du PS. Le candidat RN Alexandre Humbert-Duplais avait presque dix points d’avance au 1er tour mais il fait figure de parachuté.
Dans la 9e circonscription, c’est le député LR Alexandre Portier qui devra bénéficier d’un bon report des voix qui s’étaient portées sur le candidat socialiste au 1er tour. Sans oublier un autre réservoir de voix : les 14,4% de voix d’Ensemble au 1er tour, qui pourraient aussi lui permettre de battre le RN Patrick Louis soutenu par les LR tendance Ciotti.
La situation est plus complexe dans la 12e circonscription car le député sortant, Cyrille Isaac-Sibille, devancé d’un point par la candidate écologiste Lucie Gaillot-Durand, s’est maintenu. La candidate RN ayant quatre à cinq points de retard sur ses deux concurrents, elle devra piocher dans les 14% de votants LR pour rattraper son retard. Ce sont eux les vrais arbitres du second tour. Le centriste Cyrille Isaac-Sibille compte sur son profil consensuel et son ancrage pour l’emporter mais si une majorité de ces électeurs LR s’abstiennent, Lucie Gaillot-Durand pourrait créer de nouveau la surprise, notamment grâce à sa mobilisation contre les PFAS, ces polluants éternels.
Dans la 5e circonscription ce sont également les électeurs Républicains qui vont créer – ou pas- la surprise au second tour. La candidate MoDem sortante, Blandine Brocard part pour le moment gagnante de la triangulaire face au RN et au candidat NFP-PS Fabrice Matteucci en deuxième position au 1er tour, qui s’est maintenu. Il faudrait qu’une majorité des 14% de voix LR suivent la ligne ciottiste en se reportant sur la candidate RN pour inverser la tendance.
Les 24% d’électeurs ayant voté Ensemble au 1er tour vont-ils suivre l’appel à voter écologiste lancé par leur candidate Sarah Tanzilli dans la 13e circonscription ? Victor Prandt avait dix points de retard sur la candidate RN au 1er tour mais cette dernière n’a pas de réel réservoir de voix sauf une éventuelle portion des électeurs LR qui ont pesé près de 10% au 1er tour.
Victor Prandt est délégué régional de la Révolution écologique pour le Vivant, le mouvement animaliste d’Aymeric Caron. Ce dernier, seul député REV à ce jour et déjà réélu au 1er tour à Paris, compte bien être rejoint par Victor Prandt à l’Assemblée. C’est en tout cas le seul candidat de REV au second tour en France, les autres s’étant retirés pour faciliter l’élection de candidats anti-RN : un Modem, un LR mais aussi Gérald Darmanin, l’ancien ministre de l’Intérieur, dans le Nord. Les macronistes vont-ils voter pour un candidat caroniste ? Une configuration inédite.
Dans la 8e circonscription, le candidat RN Jonathan Gery (33% au 1er tour) peut être battu par la socialiste Anne Reymbaut (NFP) ou la député LR sortante Nathalie Serre au second tour si l’une ou l’autre bénéficie d’un report majoritaire des 20,66% recueillis au 1er tour par le candidat centriste Dominique Despras. Toutefois, cela reste une triangulaire dans laquelle les candidates PS et LR accusent un retard de 10 à 13 points par rapport au RN. Regrettant que Nathalie Serre, arrivée 3e, ne se soit pas retirée, le candidat MoDem n’a pas donné de consigne de vote.
Dans la 7e circonscription, le candidat Horizons Alexandre Vincendet, ancien député Les Républicains est largement distancé par le candidat LFI Abdelkader Lahmar. Avec 20 points d’avance sur l’ancien maire LR de Rillieux-la-Pape et le RN qui ont peu de report de voix possible (seulement 3,5% de votes LR), il semble quasi assuré de l’emporter au second tour.
En revanche, à Lyon, aucun candidat ne s’est désisté pour éviter une triangulaire dans les 1ère et 4e circonscriptions. Il faut préciser qu’aucun des candidats RN, malgré une forte progression de l’extrême-droite, n’est en position de l’emporter. L’union de la gauche qui dirige déjà Lyon et la Métropole, est sortie en tête du 1er tour.
Pour rattraper son retard de quasi 13 points sur la candidate LFI, le député sortant macroniste de la 1ère circonscription Thomas Rudigoz n’a que les 6% des votes LR au 1er tour comme potentiel réservoir de voix. Avec ses 42% de votes au 1er tour, la candidate LFI Anaïs Belouassa-Cherifi soutenue par le NFP reste donc favorite sauf mobilisation d’abstentionnistes pro-Macron ou anti LFI.
Dans la 4e circonscription, la socialiste Sandrine Runel a huit points d’avance sur la député sortante macroniste Anne Brugnera. Les LR se retrouvent en arbitre avec leur 10% de voix au 1er tour. L’ancien député RPR Emmanuel Hamelin a appelé à voter pour Anne Brugnera et les autres candidats Ensemble présents au second tour à Lyon, au nom du combat contre les extrêmes.
Au final, il ne reste dans le Rhône que trois duels simples : Boris Tavernier (société civile investi par les écolos-NFP) favori dans la 2e circonscription à Lyon, Idir Boumertit (LFI-NFP) député sortant qui devrait être réélu dans la 14e circonscription. Mais aussi une configuration unique, à Villeurbanne, avec un député LFI sortant Gabriel Amard contre un socialiste Jean-Paul Bret. Malgré ses 26 points de retard au 1er tour, l’ancien maire et ancien député de cette ville, qui a toujours combattu l’alliance de son parti avec le mouvement de Mélenchon, compte sur l’électorat modéré pour l’emporter dans cette 6e circonscription.
