Législatives : Les nouveaux candidats dans le Rhône

Les différentes forces politiques n’ont pas adopté la même stratégie pour désigner leurs candidats. Certains misent sur l’expérience et la stabilité, surtout lorsqu’ils ont des députés sortants ou des élus de terrain, d’autres n’hésitent pas à lancer des profils nouveaux pour tenter un coup ou préparer l’avenir. Tour d’horizon. Par Maud Guillot RENAISSANCE PARIE SUR SES DÉPUTÉS Pour la majorité présidentielle, les investitures n’ont pas été particulièrement compliquées. Les 8 députés sortants repartent en campagne, mais pas toujours avec la même tranquillité d’esprit car les triangulaires pourraient être plus nombreuses qu’il y a deux ans: Thomas Rudigoz (1ère circonscription), Anne Brugnera (4e circonscription), Thomas Gassilloud (10e circonscription), Jean-Luc Fugit (11e circonscription) et Sarah Tanzilli (13e circonscription). Les partenaires de Renaissance comme le Modem ont également sou- tenu leur parlementaire : Cyrille Isaac-Sibille (12e circonscription) et Blandine Brocard (5e circonscription). Mais aussi l’ancien maire de Rillieux Alexandre Vincendet, désormais Horizons, le parti de l’ancien Premier ministre Edouard Philippe (7e circonscription). Dans la 2e, Loic Terrenes espère créer la même “surprise” qu’en 2022, alors que le député sortant (Les Écologistes) Hubert Julien-Laferrière ne se représente pas. Mais c’est bien la gauche qui l’avait emporté et qui part favorite sur cette circonscription lyonnaise. Ce diplômé de Sciences Po Grenoble qui a notamment été assistant parlementaire de l’ancien ministre de la Santé Olivier Véran est aujourd’hui cadre chez My Job Glasses, une plateforme de rencontres professionnelles. Dans la 8e circonscription, à l’est du Département, Dominique Despras, est de nouveau investi par la majorité présidentielle. Cet agriculteur bio, ancien président de la Chambre d’agriculture du Rhône, a ses chances face à la LR Nathalie Serre. Le maire de Claveisolles avait fait partie de la majorité de Laurent Wauquiez à la Région avant de démissionner. Il tentera d’apaiser les tensions avec les agriculteurs, très remontés contre le Gouvernement. Trois nouvelles personnalités ont été choisies par Renaissance pour la 3e circonscription, à Lyon, la 9e dans le Beaujolais et la 14e circonscription à l’est de Lyon. Il s’agit de Clara Eynaud-Lassalle, 20 ans, une étudiante en droit, pour la 3e. Le choix de la jeunesse pour espérer contrarier la réélection de l’écologiste Marie-Charlotte Garin plutôt bien engagée au vu des scores de la gauche à Lyon. Joueuse de football pendant 10 ans, Clara Eynaud-Lassalle est sensible à la promotion du sport féminin, et la lutte contre toutes les formes de discriminations. Elle est aussi engagée au niveau associatif pour la fin de vie dans la dignité. Elle a adhéré à Renaissance après la qualification de Marine Le Pen au second tour de l’élection présidentielle. Plus au nord du département, Antoine Laurent, un militant LREM de longue date, obtient l’investiture qu’il avait demandée il y a deux ans. Le Caladois de 34 ans n’est pas revanchard car il avait dû céder sa place à Ambroise Méjean, parachuté dans le Beaujolais, puis battu par le LR Alexandre Portier. Enfin, Ludovic Almeras est candidat dans la 14e circonscription, qui compte Vénissieux, où il vit “par choix” depuis 2017. Les chances de cet infirmier de 44 ans sont minces dans ce bastion LFI. LES NOUVELLES FIGURES DU FRONT POPULAIRE Marie-Charlotte Garin pour EELV (3e circonscription), Idir Boumertit (14e circonscription) et Gabriel Amard (6e circonscription) pour les Insoumis vont logiquement défendre les couleurs du Front Populaire. Ces députés l’ont emporté facilement en 2022 et les derniers résultats électoraux ne font que les conforter. En revanche, plusieurs chantiers sont ouverts à gauche, avec de nouvelles ambitions et candidatures. Dans la 1ère circonscription, la majorité présidentielle est fragilisée, ce qui aiguise les appétits. C’est Anaïs Belouassa-Cherifi, 29 ans, qui a été choisie pour le Front Populaire. Proche de Jean-Luc Mélenchon, cette habitante du 8e arrondissement originaire de Lorraine était déjà candidate aux Européennes. Après un Master 2 Affaires publiques obtenu à Panthéon-Sorbonne, elle est devenue chargée de mission à la France Insoumise où elle est investie depuis 2017. Cette entraîneuse de handball est une militante de la cause féministe puisqu’elle a organisé des manifestations contre le harcèlement et les violences faites aux femmes dans le cadre de la vague Me-Too. Dans la 2e, Boris Tavernier a créé la surprise en obtenant l’investiture sur cette circonscription lyonnaise très convoitée. Il a même fait renoncer l’ancienne maire du 1er arrondissement Nathalie Perrin-Gilbert qui avait envisagé de candidater après son éviction de la mai- rie centrale. Très engagé dans l’Economie Sociale et Solidaire, Boris Tavernier est connu à Lyon pour avoir développé l’association Vrac (Lire portrait en encadré). Dans la 4e circonscription, qui recouvre le 6e et une partie du 3e arrondissement, ce n’est pas une inconnue qui se présente mais elle entame sa première campagne des législatives: la socialiste Sandrine Runel affrontera une ancienne camarade, Anne Brugnera, passée macroniste. Adjointe aux Solidarités et à l’Inclusion Sociale à la Ville de Lyon auprès de Grégory Doucet, Sandrine Runel, 45 ans, espérait une circonscription plus “gagnable” mais les accords de parti n’ont pas joué en sa faveur. Originaire de Nîmes, elle a suivi des études de droit et passé un DESS de Sciences Politiques à Montpellier, qu’elle a complété d’un Master en Urbanisme. Cette mère de trois enfants, arrivée à Lyon à 25 ans, occupe désormais un poste à la Direction régionale du travail. Enfin, dans la 12e circonscription, au sud ouest de Lyon (Oullins Ste-Foy- Tassin), la candidature de Lucie Gaillot-Durand ne passe pas inaperçue. A 42 ans, cette médecin spécialisée en anatomie-cyto-pathologie aux HCL se lance pour la première fois en politique. Cette mère de trois enfants avait jusqu’à présent participé aux Marches pour le Climat et milité à Anciela qui vise à accompagner les changements de mode de vie vers la transition écologique. “Mes convictions éco- logistes sont nées, il y a une dizaine d’années. De la prise de conscience presque « domestique » à la lecture du du livre de Bea Jonhson, Zero déchet en passant par des campagnes avec Zéro Déchet Lyon, j’ai de fil en aiguille affuté ma conscience politique” a-t-elle expliqué lors de la présentation de sa candidature. Plus récemment, elle a rejoint le collectif “PFAS contre Terre” pour lutter contre cette pollution responsable de maladies graves. “ J’ai calculé que pour un enfant de 9 ans, la dose de PFAS ingéré avec un seul œuf était 100 fois la dose journalière recommandée par l’autorité européenne de sécurité des aliments (l’EFSA). La colère est là.” LR: L’EXPÉRIENCE ET LES ÉLUS LOCAUX Les Républicains ont préféré jouer la carte de la constance. Surtout après le psychodrame Ciotti. Dans le Rhône, les deux sortants ont donc été réinvestis dont Alexandre Portier dans le Beaujolais. Ce jeune professeur de philosophie, tendance nietzschéenne, est un proche de Laurent Wauquiez. Originaire de Villefranche et fils de commerçants, il s’est plutôt investi sur les questions d’éducation au cours de son court mandat. Nouvelle tentative également pour Nathalie Serre qui a succédé à Patrice Verchère, en 2020 dans la 8e circonscription, à l’ouest du Département. Originaire du Doubs, cette fille de plombier-chauffagiste, aujourd’hui âgée de 55 ans, a eu de nombreuses expériences professionnelles à l’étranger et s’est engagée en politique sur le tard. Elle retrouvera face à elle comme en 2022 Dominique Despras pour Renaissance. Dans les autres circonscriptions, ce sont parfois les candidats de 2022 qui repartent en campagne : Béatrice de Montille (3e circonscription), Bastien Joint (5e circonscription), Sophie Cruz (10e circonscription) ou même des anciens députés comme Marc Fraysse à Villeurbanne (6e circonscription) ou Philippe Meunier à l’Est du Département (13e circonscription). On parie sur l’expérience avec des élus de terrain : Grégory Sansoz élu depuis plusieurs mandats dans le 2e arrondissement (1ere circonscription), Pascal Charmot, le maire de Tas- sin (12e circonscription), le jeune Romain Billard, élu du 6e arrondissement, dans la 4e circonscription. La conseillère métropolitaine Myriam Fontaine va affronter son ancien collègue Alexandre Vincendet parti chez Horizons (7e circonscription). Enfin, la famille Guillo- teau est représentée avec la fille du président du Conseil départemental du Rhône, Maryll Guilloteau dans la 2e. On note au moins une nouvelle tête pour les Républi- cains dans la 11e circonscription : Cindy Ferro, étudiante de 20 ans en sciences politiques, originaire de Millery et collaboratrice des élus LR à la Ville de Lyon. RN: LES CANDIDATS VERSION BARDELLA Le Rhône n’est pas une terre de conquête pour le Rassemblement National, même s’il progresse dans la Métropole. Andrea Kotarac l’a bien compris. Porte-parole du Rassemblement national et conseiller régional, il a choisi de candidater... dans l’Ain. Le canal historique représenté par Michelle Morel ou Christophe Boudot n’est pas non plus mis en avant. Il faut dire que Christophe Boudot a comme Marion Maréchal fait un petit détour par Reconquête avant de revenir dans son parti d’origine. Seule la déléguée départementale du RN dans le Rhône, Tiffany Joncour défendra de nouveau ses chances, mais en passant de la 7e circonscription en 2022 à la 13e en 2024, plus “gagnable”. Il y aura donc comme à chaque élection beaucoup de nouveaux candidats pour le Rassemblement National, qui mise avant tout sur l’étiquette. Anaëlle Bisleau, Sasha Bitoum, Clémence Luisier... Deux circonscriptions semblent intéressantes pour ce parti, la 8e et la 9e. Dans la 9e, le RN s’est associé avec Reconquête pour parachuter Patrick Louis, professeur d’économie et de géopolitique à Lyon III. Cet ancien eurodéputé sous la bannière Mouvement pour la France (2004-2009) est proche de Marion Maréchal puisqu’il préside le conseil scientifique de son école à Lyon (ISSEP). En revanche, le Rassemblement National et Reconquête n’ont pas réussi à s’entendre dans la 8e circonscription où Jonathan Géry (RN) affrontera Xavier Fourboul (Reconquête). BORIS TAVERNIER C’est la première fois que Boris Tavernier se lance en politique. Investi par le Front Populaire dans une circonscription gagnable, la 2e à Lyon, il pourrait devenir député en juillet prochain. Un signe d’ouverture de la part de la gauche qui fait ainsi confiance à un membre de la “société civile”, non encarté. Mais Boris Tavernier dispose d’un vrai ancrage local et d’une expérience professionnelle atypique. Cet autodidacte de 45 ans, a créé l’association Vrac en 2013 pour rendre plus accessible la nourriture de qualité, bio et locale, à des populations comme celles des quartiers, grâce à des groupements d’achat. Une initiative très novatrice qui lutte contre la précarité alimentaire. Originaire de Frévent dans le Pas-de-Calais, Boris Tavernier a grandi dans une famille ouvrière et a rejoint Lyon en 2001, après la fac mais sans diplôme. Sollicité par deux amis, il crée De l’autre côté du pont en Scop en 2004, bar- restaurant-salle de spectacle dans un quartier populaire. Il reprend alors ses études pour obtenir un master en économie sociale et solidaire. C’est sa rencontre avec un responsable de la Fondation Abbé Pierre et un bailleur social qui conduisent ce père de deux filles à créer Vrac, avec un premier dépôt à la Duchère. Depuis, cette association a pris une envergure nationale.

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