Manifester à Lyon pour que les otages enlevés le 7 octobre 2023 par le Hamas ne soient pas oubliés, c’est la mission que se sont fixée les Lyonnaises à l’initiative du collectif Tous Unis. Cette mobilisation continue ce mercredi 12 mars, place des Terreaux. Les explications de Fabienne Levy, porte-parole. Par Lionel Favrot
Pourquoi avez-vous monté ce collectif ?
Fabienne Lévy : Parce qu’on avait remarqué à Paris l’initiative de WIZO, une organisation qui défend les droits des femmes en Israël et qui récolte notamment de l’argent pour créer des écoles et des centres sociaux dans ce pays. Des femmes, juives et non-juives, et des hommes se réunissent le vendredi au Trocadéro pour demander la libération des otages enlevés par le Hamas le 7 octobre 2023.
On s’est demandé, pourquoi, à Lyon, alors qu’on avait régulièrement des manifestations pro-palestiniennes, il ne se passait rien. Bien sûr, il y a le CRIF, le Conseil représentatif des institutions juives de France qui organise des évènements officiels. Nous, on voulait interpeller directement les Lyonnais. On a commencé il y a environ huit mois quand on a vu que la situation restait bloquée.
Qu’est-ce qui vous motive ?
Dire que nous sommes concernés en tant que Françaises de religion juive engagées dans la cité : avocates, pharmaciennes, dentistes, cheffes d’entreprise… Mais aussi pour dire que la lutte contre le terrorisme est l’affaire de tous. Quand Ingrid Betancourt est otage en Colombie, la France se mobilise. Quand plus de 100 otages, dont cinq Français, sont dans les geôles des tunnels de Gaza, c’est aussi l’affaire de tous.
Le Hamas est venu chercher ces otages qui ont été martyrisés, violés… Ce n’est pas la même chose que de faire la guerre. On ne pouvait pas rester muettes pendant que ces otages sont enfermés dans des tunnels. On est partis à quatre et aujourd’hui, avec Tous Unis et Bring Them Light, un autre collectif qui se mobilise en permanence pour les otages, on est environ 350. Des femmes mais aussi des hommes de la LICRA.
Avez-vous encore l’impression qu’il y a une forme d’oubli de ces otages ?
Oui, on oublie aussi qu’il y a eu 1 300 personnes assassinées lors de ce Festival pour la paix et les otages ont quelque part été mis de côté. On constate même une multiplication des faits antisémites en France avec des passages à l’acte au prétexte de la guerre au Proche-Orient. Dans nos collectifs, on voulait dire qu’on est là.
Quand on apprend la mort de Shiri Bibas et de ses deux enfants Kfir et Ariel, c’est un drame pour les Israéliens et les juifs de la diaspora, mais aussi pour n’importe quel parent qui comprend que le Hamas peut venir lui enlever ses enfants. Nous, on voulait que ces otages soient le symbole pour dire : Amour, Paix, Fraternité.
Parmi les otages enlevés par le Hamas, il y avait des membres de familles de la région ?Pas directement mais on a identifié des proches des otages. Ceci dit, on se serait mobilisés de la même façon si ce n’était pas le cas. On a également reçu un otage libéré venu de façon très discrète pour une conférence. Ce qu’a perpétré le Hamas, c’est un progrom comme on l’a déjà vu dans l’histoire avec des massacres de juifs en Pologne, en Ukraine ou en Russie. Aujourd’hui, il y a une transformation de l’antisémitisme qui se cache derrière la lutte contre le sionisme. On ne veut pas que le conflit israélo-palestinien serve de prétextes ou de justification à l’antisémitisme et au passage à l’acte.
Des élus lyonnais sont venus à vos manifestations ?
Quelques-uns. Thérèse Rabatel, ancienne adjointe à l’égalité femmes-hommes à la Mairie de Lyon, vient souvent. François-Noël Buffet, Thomas Rudigoz, David Kimelfeld et Nicolas Daragon, le maire de Valence, nous ont passé des mots de soutien.
Et la mairie écologiste de Lyon ?
Je ne suis pas là pour faire de la politique. Elle est comme elle est. Le maire Grégory Doucet vient aux manifestations officielles du CRIF ou envoie des élus. Sa première adjointe à la Mémoire a démissionné et il a pris quelqu’un d’autre… On va voir.
C’est quoi ce refus d’illumination pour les otages du Palais de justice, les fameuses “24 colonnes”, dans le 5e arrondissement ?
On voulait l’illuminer en orange avec le soutien de Richard Zelmati, président du CRIF Auvergne-Rhône-Alpes. C’est un symbole car Palais de Justice a accueilli le procès Barbie en 1987. L’extérieur, donc les grilles et les escaliers, appartiennent à la Ville de Lyon qui avait donné son accord. Elle avait même envoyé des services techniques pour l’illuminer en orange. Mais l’intérieur appartient au Ministère de la Justice et la procureure générale et la présidente de la Cour d’appel ont refusé au nom de la neutralité de la Justice. Moi, je dis que c’est au nom de la lâcheté de la justice !
Où vous rejoindre prochainement ?
On a commencé place des Jacobins avec des poussettes vides portant les noms des otages. On est également allés place Carnot mais on est le plus souvent place des Terreaux, sur les escaliers de la mairie, avec des affiches des otages. Prochain rendez-vous : le mercredi 12 mars. On prévoit aussi des opérations sur les marchés le 23 mars pour sensibiliser à cette montée de l’antisémitisme.